Echouage

 

Echouée sur le sable, couchée sur le côté,

Ballottée par les vagues, la mine dépitée,

Elle a l’air fatiguée d’avoir trop voyagé,

L’épiderme fissuré des personnes trop âgées.

Tous les haubans ballant tels des bras épuisés

Et les voiles faseyant par les vents lacérées,

La vieille goélette a tellement navigué,

Vécu tant de tempêtes, tant de mers déchaînées,

A vu tant de pays, de ports et de jetées

Et pour tant de marins servi leur volonté,

Evitant les écueils par ses seules qualités,

Qu’elle aurait mérité une autre destinée.

Quel est donc l’abruti qui l’a abandonnée

Telle une crotte sur la plage par un chien mal élevé ?

N’avait-elle pas le droit au bout de tant d’années

De terminer sa vie avec plus de beauté ?

C’est la honte des hommes d’ainsi laisser tomber

Une fois que c’est usé ce qu’ils ont tant aimé.


Copyright Jacques R. Verpeaux (Eucalion) © Droits de reproduction et de diffusion réservés - Ecrire : jacques@verpeaux.net