La fin des bonnes prairies

Dans des prairies bien grasses, paissaient de belles vaches.
L'éleveur était sage et voulait que l'on sache
Qu'il avait un lait riche en grande quantité,
Mais voulait bien aider tout autre moins bien gâté.
A quelques lieues de là, sur des terres moins fertiles,
La condition des vaches était très difficile,
Avec de l'herbe maigre souffrant de rareté.
Comment faire pour avoir du lait de qualité ?
Un arrangement passèrent, sous l'égide du village,
Que l'éleveur prodigue aiderait au vélage,
Cèderait au second un peu de son lait riche
Pour combler les lacunes de ses terrains en friche.
La production de l'un gardait toute sa richesse
Quand le moins bien loti corrigeait ses faiblesses,
Et si les vaches de l'un restaient les mieux servies,
Tous les bestiaux de l'autre s'en trouvaient bien ravis.
Mais le fils du premier, un jour prit les commandes.
Pour rendre les choses meilleures, ses idées étaient grandes
Car il était pétri de bonnes intentions
Et désirait remettre les choses en question.
A partir d'aujourd'hui, dit-il à l'assemblée,
Mes prairies sont ouvertes autant que le voulez
Et de mon herbe grasse vous pourrez vous servir,
Des inégalités, mon voeu est d'en finir.
Quand on leur présenta une aussi belle aubaine,
Les vaches des mauvais prés voulant une vie plus saine,
En toute bonne logique, s'empressèrent d'accepter,
Et dans les riches prairies s'en vinrent en quantité.
Tant de bestiaux lâchés jusqu'à se piétiner,
Des anciennes prairies vertes firent un terrain miné
Qui bientôt ressembla aux terres les plus arides,
Ne pouvant plus nourrir, même les plus avides.

Dans les deux élevages, la qualité décrut,
De bonnes vaches laitières, la race disparut
Car on ne trouvait plus, pour les veaux du bon lait,
Capable de les nourrir autant qu'il le fallait.

Copyright Jacques R. Verpeaux (Eucalion) © Droits de reproduction et de diffusion réservés - Ecrire : jacques@verpeaux.net